Émission d’actions : un exemple
Émission d’actions : exemple
Vous avez lu cet article sur le marché des actions, ça vous intéresse et vous voulez savoir comment, concrètement, ça marche ? On aborde ici un exemple. Attention, malgré un effort de vulgarisation et de donner des chiffres, je garderai une notation mathématique généraliste.
L’entreprise QMF se développe bien et pour continuer sa croissance, a besoin de lever des fonds. Elle décide d’augmenter son capital par une émission de nouvelles actions.
Conséquence de l’émission sur le cours de l’action et la capitalisation de l’entreprise
L’action de QMF vaut S(t) et sa capitalisation C(t). Ici on utilise des fonctions pour signifier que c’est une valeur qui varie en fonction de t (le temps), jusqu’ici tout est logique. L’augmentation souhaitée par QMF fera varier ces valeurs comme on a vu dans l’article sur les émissions.
On considère qu’il y a trois périodes, t0 pour avant l’augmentation, t1 pour l’augmentation et t2 pour après l’augmentation.
Pour l’augmentation de capital, QMF choisi un prix d’émission pour lequel elle vend ses nouvelles actions. Ce prix est généralement inférieur au prix au prix du marché mais assez proche quand même. La valeur de marché n’a aucune raison d’être égale à la valeur nominal, comme on a vu, car elle intègre la valeur des réserves et la potentielle croissance future. Le prix de marché est sensé intégré toutes les informations connu sur l’entreprise.
Cette différence de valeur s’appelle la prime d’émission (prix d’émission – valeur nominal).
Pour résumer :
S(n) = valeur nominale
N = nombre d’action avant l’émission
n = nouvelles actions
S(e) = prix d’émission
La capitalisation s’écrie donc C(t0) = NS(t0), le nombre d’action de base multiplié par le prix avant émission.
La nouvelle capitalisation s’écrie donc C(t2) = (N+n)S(t2).
Soit la somme des actions multiplié par le nouveau prix de marché. Pour le moment logique.
Dans la théorie, la valeur de l’entreprise est sensée augmenter du montant apporté par les nouvelles actions, soit C(t2) = C(t0) + nS(e)
Dans cette relation théorique, si on remplace C(t0) par sa valeur NS(t0) et C(t2) par sa valeur (N+n)S(t2) on retrouve (N+n)S(t2)=NS(t0) + nS(e)
On fait passer (N+n) de l’autre côté ça nous donne la valeur théorique de l’action après émission soit :
S(t2) =(NS(t0)+nS(e)) / (N+n) = C(t2) / (N+n)
ou pour la partie droite la nouvelle capitalisation diviser par le nouveau nombre d’action.
Ça demande une lecture plus attentive, mais c’est logique.
Une émission avec des chiffres peut-être ?
Avec un exemple chiffré (enfin !!), supposons que :
S(t0) = 50 , prix avant émission
C(t0) = 100 000 , capitalisation avant émission
N= 2000 , nombre d’action avant émission
S(n) = 25 , prix nominal
n = 1000 , nouvelles actions
S(e) = 45 , prix d’émission
Le nouveau cours de l’action est théoriquement :
S(t2)= (2000* 50 + 1000*45)/(2000+1000)= 48,3333
Soit en baisse d’un peu moins de 2€. J’essaierai de faire un article sur une vraie augmentation de capital pour bien imager en condition réelle.
Quid des anciens actionnaires pendant les augmentations de capital ?
Vous me direz après tout ça, “mais si on est déjà actionnaire, on se fait un peu flouer non ?” Une augmentation de capital entraine une baisse du cours de l’action (à cause de l’émission à un prix plus bas), en tant qu’actionnaire, je n’ai pas intérêt à voter pour une augmentation de capital, même si elle est bénéfique pour l’entreprise. Pour compenser cette perte de valeur, le législateur, donne aux actionnaires un droit préférentiel de souscription. Ce droit donne accès, au prorata des actions détenues, en priorité aux anciens actionnaires. Une action détenue vous donne le droit d’acheter $n/N$ au prix de l’émission (pour QMF par exemple, 0,5 action. Il peut être valorisé par un coupon négociable, qu’on appelle droit de souscription, que chaque ancien actionnaire possède (on va le nommer DS).
Pour que les anciens actionnaires ne soient pas lésés, la valeur de ce droit doit être égale à la baisse de l’action. Elle doit compenser la perte donc :
DS=S(t0)-S(t2)
Comme on obtient n/N nouvelles actions, on prend ce ratio sur la variation de cours qu’on aura pour calculer la valorisation de ce droit de souscription et on obtient :
DS=(n (S(t2)-S(e) ) / N
En remplaçant S(t2) par sa valeur plus haut, ça nous donne :
DS=(n (S(t0)-S(e) ) / (N+n)
Pour QMF :
DS=0,5*(48,3333-45)=1,66 qui compense parfaitement la baisse du cours de QMF après émission.
Cas particulier : distribution d’action gratuite
Comme on a vu, une augmentation de capital peut être faite par incorporation de réserves, ce qui emmène à recevoir des actions gratuites, appelé, distribution d’actions gratuites. Ce droit s’appelle droit d’attribution (DA). Ce droit peut s’apparenter à un coupon ressemblant au droit de souscription. On peut appliquer les formules plus haut mais en prenant conscience du coup que la valeur de notre prix d’émission est nulle.
C(t2)=C(t0) , S(t2) = NS(t0) / (N+n) , DA = nS(t0) / (N+n) = nS(t2) / N
C’est quoi une action ajustée dans une émission d’actions ?
On sait comment évaluer la performance d’une action entre deux dates. Si le prix monte, elle fait une performance positive, sinon une négative. Mais comment évaluer sa performance si entre ces deux dates il y a une augmentation de capital ? On a vu qu’une augmentation de capital faisait baisser le prix de l’action, mais sa performance est-elle donc aussi lésée ?
Réellement non, car c’est compensé exactement par les droits de souscription ou d’attribution. J’attire votre attention ici qu’une analyse simpliste d’une action peut être biaisé par cette information, à savoir s’il y a eu une augmentation de capital et vous amener à sous évaluer l’action.
Pour avoir la bonne performance de QMF après l’augmentation de capital, il faut valoriser le portefeuille d’un actionnaire. Pour faire simple, il possède une seule action. Il ne participe à aucune augmentation de capital car il n’a pas assez d’action (en pratique, si le ratio n’est pas un entier, on retient seulement la partie entière du quotient, dans notre exemple c’est inférieur à 1). Il vend donc son droit DS pour acheter de nouvelles actions au prix du marché S(T2). Il se retrouve dans son portefeuille avec 1+DS / S(t2) actions. Ce coefficient s’appelle coefficient d’ajustement (Coef). La valeur du portefeuille ne varie donc pas le jour de l’opération (on parle d’opération blanche).
Le coefficient d’ajustement est aussi égal à Coef=S(t0) / S(t2) s’il y a un droit de souscription et Coef=(N+n) / N s’il y a une distribution d’actions gratuites.
Si on veut réellement évaluer la performance d’une société, il faut prendre utiliser la notion d’action ajustée. Si on veut la valeur d’une action ajustée d’une société il faut tous les coefficients d’ajustements entre les deux périodes voulues. Il faut multiplier le cours de l’action courante par tous les coefficients d’ajustements entre les deux périodes. Il y a autant de coefficient d’ajustement que d’opération en capital pour la société. Le cours de l’action ajustée n’est pas discontinu contrairement à celui de l’action courante. Effectivement le jour d’une augmentation ou distribution, on observe que le cours de l’action baisse dès l’ouverture, le marché ouvre avec l’action directement à la nouvelle valeur.
Contextualiser le coefficient d’ajustement lors d’une émission d’actions
On va prendre notre cas concret de l’entreprise QMF pour montrer l’importance du coefficient d’ajustement.
On se situe le 1er mars, QMF a 2000 actions en circulation cotées 50€.
Le 2 mars, elle émet ses nouvelles actions, 1000 à 45€. On a calculé la valeur du droit de souscription à 1,66.
La nouvelle action devrait côter 48,33 le 2 au soir après l’augmentation.
Notre actionnaire fait une opération blanche, vend ses droits de souscription 1,66€ et achète 1,66/48,33=0,034$ actions.
Il se retrouve le 3 mars donc avec 1,034 actions.
Le nombre de titre qu’il possède est augmenté dans la proportion DS / S(t0) et :
(1+1,66/48,33) = 50/48,33 = S(t0) / S(t2)
Le 15 juillet, QMF distribue une action gratuite pour cinq anciennes.
Le 16 juillet, l’actionnaire aura donc (1+1,66/48,33)(1+1/5), donc 1,24 actions.
Le 1er aout, une nouvelle sur QMF fait tomber le prix à 47€.
Donc si on calcule la performance de l’action entre le 1er mars et le 1er aout, l’action perd 3€ donc -6%. Mais si on calcule la valeur du portefeuille de l’actionnaire qui a réalisé ses opérations blanches durant toute cette période, il a gagné 8,28€ par action (1,24*47). La performance de son portefeuille contenant seulement ce titre a augmenté de 16,56% en réalité !! Si QMF verse des dividendes pendant cette période, la performance est supérieure encore.
Pour résumer, on observe le cours de bourse de QMF entre le 1er mars et le 1er aout, on voit une performance négative de 6% passant de 50€ à 47€. Mais durant cette période QMF a réalisé des opérations en capital, et le cours de l’action ajustée est lui passé de 50€ à 58,28€, soit +16,56%.
Dans cet article nous avons expliqué les émissions d’actions sur le marché à travers un exemple. Nous avons vu qu’en théorie nous pouvons connaitre le prix post opération de l’action. Je ferai un article jumeau avec l’analyse d’une augmentation de capital réelle. Les actionnaires de l’action avant opération reçoivent un droit de souscription qui leur permet de prendre une partie de ces nouvelles actions au prorata de la quantité qu’ils possèdent, pour ne pas être lésé car l’augmentation de capital fait baisser le cours de l’action mécaniquement. Enfin, à travers l’exemple, nous avons montré qu’il faut faire attention à son fournisseur de données boursière quand on analyse un titre et sa performance, et savoir s’il donne bien le cours de l’action ajustée ou seulement le cours de l’action courante.
N’hésitez pas à liker et partager !